Rénover, oui, mais encore faut-il que les propriétaires jouent le jeu et mettent la main à la poche. Et ce ne sera peut-être pas aussi facile qu’on veut le croire.
Finies les passoires énergétiques (cibles du nouveau diagnostic de performance énergétique) à la location en 2028, c’est dit, et redit. Leur éradication est déjà programmée par le projet de loi Climat et résilience. Interdiction de louer un logement en G en 2025, en F en 2028 et en E en 2034. Sous-entendu, les bailleurs n’ont plus qu’à rénover leurs logements. Pas d’autre choix si on veut sauver la planète.
C’est bien beau, mais on oublie un peu vite combien entre la réglementation et la réalité, il existe parfois un sacré fossé. Et en matière de rénovation énergétique, ne nous leurrons pas, les propriétaires risquent aussi de manquer d’empressement.
Un sondage de l’Unpi (Union nationale des propriétaires immobiliers) réalisé en avril, permet déjà de se faire une petite idée : 41% des propriétaires estiment que leur bien n’est pas une passoire énergétique et qu’ils ne sont donc pas concernés, 13% des propriétaires envisagent de vendre plutôt que de rénover, 17% attendront que les sanctions soient effectives pour lancer des travaux, 8,77% songent à louer leur bien malgré l’interdiction et 7,44% pensent laisser leur logement vide plutôt que de le mettre en conformité et finalement, seuls 11,87% souhaitent effectuer des travaux au plus vite. Si on veut dire les choses autrement, plus d’un propriétaire sur deux n’a aucune intention de réaliser des travaux.
On le voit bien, la rénovation énergétique est loin d’enthousiasmer les bailleurs. Il faut dire que l’addition est plutôt salée : l’Unpi, toujours, a estimé le montant de la facture à 56 milliards d’euros pour amener les logements du parc locatif privé (et uniquement privé) à un classement en D. 88 milliards si l’on veut du BBC, comme c’est prévu à horizon 2050. Et même si le gouvernement a musclé MaPrimeRénov’, cette rénovation est loin, bien loin d’être indolore pour les propriétaires. Davantage d’aides reste une condition sine qua non pour embarquer davantage de propriétaires.
Le deuxième écueil à cette ambitieuse rénovation reste l’absence de sanction systématique. Oui, bien sûr, le locataire qui constate que son bien ne satisfait pas aux critères de décence énergétique, peut passer par la case justice. Mais combien de locataires se lanceront dans une telle procédure par essence longue et fastidieuse ? Ajoutons à cela des dérogations comme pour les copropriétaires où les travaux ont été refusés en assemblée générale, on voit combien la promesse d’une éradication des passoires énergétiques à horizon 2028 est bien fragile.