Bientôt 25 ans que les textes interdisant l’amiante sont sortis. Depuis 1996, la France s’est dotée d’une politique de gestion du risque exemplaire, mais elle n’a toujours pas affronté la question de l’éradication de l’amiante.
Il paraît que la France est championne du monde de la réglementation amiante. C’est sans doute vrai. Et son abondante littérature réglementaire depuis 25 ans en atteste : elle est comparable à celle du nucléaire. En matière de repérages, d’analyses ou de désamiantage, notre pays s’est doté d’un savoir-faire unique, qui se révèle parfois source d’inspiration chez nos voisins : l’Espagne vient ainsi de publier une norme amiante largement inspirée de notre chère NF X 46-020.
Bien sûr, on peut toujours trouver à redire. Pointer du doigt les trous dans la raquette, ou déplorer que cette réglementation si fournie ne soit pas appliquée comme il le faudrait (on a déjà parlé de la réglementation DTA dont l’application laisse encore à désirer après 10 ans d’existence). Mais au bout du bout, en matière de gestion de risque amiante, la France ne souffre aucune comparaison.
À se perdre dans le détail, on en oublie parfois l’essentiel. Préoccupée depuis 25 ans par la prévention des expositions à l’amiante, la réglementation ne parle jamais d’éradication. Hors du contexte démolition/travaux, les seuls désamiantages imposés concernent les matériaux dégradés de la liste A. Au rythme actuel, il faudra encore des décennies et des décennies pour venir à bout des quelque 20 millions de tonnes d’amiante -selon les estimations courantes- toujours en place dans le bâti. Avec des matériaux dont les plus récents auront bientôt un quart de siècle.
Ailleurs, on voit pourtant poindre des politiques massives de désamiantage. Au niveau national, comme au niveau local. En Pennsylvanie (États-Unis), aux Baléares, ou même outre-Manche, les pouvoirs publics financent le retrait d’amiante dans les écoles par exemple. La Pologne ambitionne d’éradiquer l’amiante sur son territoire. En Espagne, plusieurs régions ont aussi adopté de telles politiques volontaristes…
Et en France ? Rien, nada, nothing. Les propositions telles que la création d’un pôle d’éradication de l’amiante, portée par la Coordination des associations de victimes de l’amiante et des maladies professionnelles (Cavam), et relayée par de nombreux parlementaires en 2018, restent lettre morte. Championne du monde de la réglementation amiante, la France semble paradoxalement manquer d’ambition quand il s’agit d’en finir une bonne fois pour toutes avec l’amiante.
Pour en savoir plus sur l’amiante, écoutez le podcast Infodiag « Mieux comprendre l’amiante et mes obligations ».